La Fête Du Printemps

Livre II – épisode 42

Couloir du château, jour. Perceval et Karadoc se tiennent dans un couloir du château.
Karadoc (Chantant et se bouchant une oreille.) Viendras-tu donc, belle amie, digue digue dondaine... (À Perceval.) Et vous reprenez tout de suite !
Perceval Je reprends la même chose ?
Karadoc Mais oui, c'est un canon, vous faites exactement comme moi, en décalé.
Perceval (Se bouche un œil et chante.) Viendras-tu donc, belle amie...
Karadoc Non ! Il faut que je commence d'abord.
Perceval Ah ouais...
(Ouverture.)
Salle de la Table ronde, jour. Arthur et Bohort sont assis à la Table ronde. Venec est debout devant eux.
Venec Non mais Sire, au moins expliquez-moi ! La fête du printemps, jusqu'à maintenant c'est toujours moi qui m'en suis occupé ! Vous vous êtes jamais plaint, que je sache ?
Arthur Bah c'est-à-dire moi...
Bohort Cette année, on a décidé de changer un peu le ton.
Venec Mais qu'est-ce que vous voulez changer comme ton ? Une fête c'est une fête !
Bohort Là en l'occurrence, il s'agit de la fête du printemps. On va essayer de collercoller (v.) Correspondre à quelque chose, convenir
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à la thématique, pour une fois.
Venec (À Arthur.) Collercoller (v.) Correspondre à quelque chose, convenir
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à quoi ?
Arthur Non mais, c'est vrai que jusqu'à maintenant... alors c'est pas que c'était mal foutu, mais bon... on bouffait comme des porcs, on finissait à quatre pattes, euh... c'est vrai que le printemps, c'était une notion assez vague quand même...
Bohort Même pas une fleur sur les tables !
Venec Ah mais moi si vous voulez des fleurs euh... c'est pas le plus compliqué !
Bohort Merci Venec, je prends les choses en main. On vous appellera pour la fête du cochon !
Venec Ben... pour la fête du cochon, je m'excuse mais... vous bouffez comme des porcs, et vous finissez à quatre pattes...
Arthur Oui mais là ça va. Là on peut parce que c'est thématique.
Salle de la Table ronde, jour. Arthur et Bohort sont assis à la Table ronde.
Bohort (Réjoui.) Tout le monde participe, c'est parfaitement délicieux ! Vous allez être comblé, Sire !
Arthur Vous pouvez vous calmer ?
Bohort Nous accueillons le seigneur Léodagan, qui vient nous présenter sa proposition.
Léodagan (Arrive, accompagné d'un homme enchaîné.) « Ma proposition », j'ai pas bien eu le temps de gambergergamberger (v.) Réfléchir
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, moi.
Arthur Qui c'est, celui-là ?
Léodagan Je suis désolé, j'ai trouvé que lui.
Bohort Mais qu'est-ce que vous comptez faire avec ça à la fête du printemps ?
Léodagan Le faire cramercramer (v.) Brûler
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 !
Bohort (Indigné.) Quoi ? Mais vous plaisantez !
Léodagan Vous me dites « Il faut quelque chose de festif » !
Bohort Mais quel rapport avec le printemps ?
Léodagan (Agacé.) Mais j'en sais rien, moi ! C'est en plein air, je sais pas...
Arthur (Sarcastique.) Ah, le printemps... la nature se réveille... les oiseaux reviennent... on crame des mecs...
Bohort Merci Seigneur Léodagan, mais on va trouver autre chose.
Léodagan Bon bah démerdez-vous hein. Moi j'ai autre chose à foutre qu'à promener ce con-là toute la journée.
(Léodagan et l'homme haussent les épaules et s'en vont.)
Bohort (À Arthur.) Accueillons à présent Dame Séli.
Séli (Arrive, accompagnée d'une femme qui pose un panier devant Arthur et Bohort.) Bon, moi je suis arrivée à un compromis pas trop crade, un genre de tarte, avec des oignons, du chou, du céleri et des épices.
(Arthur et Bohort goûtent la tarte.)
Séli Alors ?
Bohort (Mal à l'aise.) C'est intéressant.
Séli (Fronce les sourcils.)
Arthur Le plus intéressant c'est... comment est-ce que vous arrivez à faire un truc aussi immonde avec des ingrédients normaux ?
Séli Immonde ?
Bohort C'est vrai que c'est spécial !
Arthur Non mais c'est incroyable, mais j'ai l'impression de bouffer de la terre avec de la bouse et du gravier, ça sent le poulailler, mais c'est du céleri et des oignons. C'est prodigieux.
Salle de la Table ronde, jour. Arthur et Bohort sont assis à la Table ronde. Devant eux se tiennent Yvain, déguisé en abeille, et Gauvain, déguisé en fleur.
Yvain (À Gauvain.) Hé ! Dame Nature. Que vous en est nenni grâce à vos yeux.
Gauvain Point ! Point petit insecte subtil. La vie est comme l'onde, fraîche et liquide comme l'ondée.
Yvain Mais que vous en est nenni !
(Yvain et Gauvain intervertissent leur place.)
Yvain Opterez-vous pour un printemps gracieux, et fraîche comme l'ondée ?
Gauvain (Se détournant et croisant les bras.) Point, insecte subtil. (Se retourne vers Yvain et lui ouvre ses bras.) Viens picorer les mets de Dame Nature !
Yvain Grâce à vos yeux.
(Yvain et Gauvain saluent leur public.)
Bohort (Applaudit, souriant.) C'est, comment dire... c'est assez frais. (À Arthur.) Au moins, ça a un rapport avec le printemps. (À Yvain et Gauvain.) C'est bon ! On garde.
Yvain (Ravi.) Ah ouais ! C'est hyperhyper (adj.) Excellent, fantastique
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.
Gauvain (Ravi.) Merci, mon oncle !
Yvain On a hâte d'y être !
(Fermeture.)
Salle de la Table ronde, jour. Arthur et Bohort sont assis à la Table ronde. Perceval et Karadoc se tiennent devant eux. Karadoc se bouche une oreille, Perceval se bouche la moitié d'un œil. Ils chantent en canon de façon incompréhensible.
Karadoc (Chantant.) Et la fleur fille du poète, viendras-tu donc, belle amie, digue dondaine, viendras-tu fleurir, ma mie, ma terre ?
Perceval (Chantant.) L'oiseau étant enfant de raison, et la fleur fille du poète, viendras-tu belle amie, digue digue dondaine, viendras-tu fleurir ma terre ma mie ?
(Noir.)
Karadoc (Chantant.) L'oiseau étant enfant...
Perceval Ah mais on recommence, là ?
(Stab final.)