Vox Populi III

Livre IV – épisode 58

Salle du trône, jour. Arthur est assis sur son trône, Bohort et Léodagan sont assis de part et d'autre de lui.
Bohort Vous êtes un personnage public, Sire. Le peuple juge votre comportement !
Léodagan Bah évidemment ! Et après vos derniers exploits, hein, y a de quoi faire !
Arthur Mais qu'est-ce que ça peut bien lui foutre au peuple, que je change de femme ? Je lui demande quelque chose moi au peuple ? Non ! Bah alors il s'occupe de ses miches.
Bohort Sire, vous ne pouvez pas dire ça ! Vous êtes tenu de donner l'exemple. Vous ne pouvez pas suivre la même ligne de conduite que le premier paltoquet venu !
Léodagan (Ricane.) Mais il a pas de ligne de conduite, lui, il fait n'importe quoi !
Bohort Quand vous avez changé de femme, le peuple a été... profondément déstabilisé.
Arthur Mais qu'est-ce que vous en savez, vous ? Le peuple, vous vivez avec, peut-être ?
Léodagan Répondez pas, Bohort. Face à la mauvaise foi, y a que le mépris. Ou une claque dans le nez, peut-être, mais là... c'est autre chose.
(Ouverture.)
Salle du trône, jour. Arthur est assis sur son trône, Bohort et Léodagan sont assis de part et d'autre de lui ; devant eux se tiennent Guethenoc et Roparzh.
Guethenoc Déjà on n'était pas bien en forme ! Hein, là dessus on attend quoi... trois semaines ?
Roparzh Mais même pas !
Guethenoc Même pas trois semaines ! Même pas ! Et patatrac : les giboulées. Hein, alors là je suis désolé... mais y a de l'abus !
Roparzh De toute façon, c'est pas compliqué, chaque année, y a quelque chose. Et au gouvernement, qu'est-ce qu'ils font-ils ? Ils se roucent les poules, ils se poulent les rouces...
Guethenoc Ils se roulent les pouces !
Roparzh Voilà, mieux ! Alors maintenant, on est quand même bien curieux de savoir ce que vous allez faire.
Arthur (Ne répond rien.)
Léodagan (À Arthur.) Mais alors quoi ?
Bohort Sire, vous ne dites rien ?
Arthur Ah bah non, qu'est-ce que vous voulez que je dise ? Je croyais que j'avais perdu la confiance du peuple !
Léodagan Ah bah voilà ! Il est vexé, maintenant.
Bohort Sire, quand même... vous voyez bien que ce n'est pas le moment !
Arthur Non non non mais je suis pas d'accord ! Je ne suis pas d'accord ! Alors le peuple m'en veut, j'ai perdu sa confiance... mais qu'est-ce que vous en savez, hein ? C'est facile de parler à la place du peuple, moi aussi je peux le faire hein !
Bohort C'est mon avis, évidemment, je n'ai pas fait remplir de questionnaire...
Léodagan Oh... bah ils en sont pas, du peuple, les deux comiques là ? Y a qu'à leur demander, on sera fixés...
Guethenoc Hé hé hé ! Hé oh ! Nous on est venus ici pour les giboulées.
Roparzh Commencez pas à, noyer la peau de l'ours avant d'avoir vendu le poisson, hein !
Guethenoc Bon.
Salle du trône, jour. Arthur est assis sur son trône, Bohort et Léodagan sont assis de part et d'autre de lui ; devant eux se tiennent Guethenoc et Roparzh.
Guethenoc Ben c'est-à-dire, euh... on a plus ou moins su.
Roparzh Pour ainsi dire, on a eu vent.
Guethenoc Mais bon, on n'a pas cherché non plus à savoir plus que ça.
Roparzh Avec les giboulées, on a eu... on a eu de quoi faire hein...
Guethenoc Parce que votre... votre ancienne femme... elle s'est pas fait la malle avec un gars d'ici ?
Roparzh Ah ouais, euh... le chevalier Perniflas ! C'est pas ça ?
Bohort « Lancelot du Lac ».
Roparzh Ah ouais. Ouais ouais.
Guethenoc Donc, elle est partie, et vous en avez pris une autre.
Bohort Voilà.
Léodagan Oh ça c'est très résumé hein, parce qu'on dit que... elle s'est barrée, mais... (désignant Arthur) moi je dis que c'est lui qui l'a foutue à la porte, bon.
Arthur (Encaissant le coup.) Oh ! Oh non mais alors là vous manquez pas d'aplomb...
Guethenoc Et nous, on doit vous dire ce qu'on en pense ?
Bohort Voilà. Pour aiguiller le roi dans... dans ses choix futurs.
Arthur (Lève les yeux au ciel.) Oh...
Guethenoc (Peu intéressé.) Moi ce que je peux vous dire, euh...
Roparzh Euh... oui...
(Guethenoc et Roparzh se font des politesses, aucun n'étant très à l'aise à exprimer l'opinion générale.)
Guethenoc (À Roparzh, parlant en même temps que lui.) Oui ? Ah oui non, vous vouliez dire quelque chose ? Non mais... (Inintelligible.)
Roparzh (À Guethenoc, parlant en même temps que lui.) Non allez-y, qu'est-ce que... je vous en prie... qu'est-ce que...
Guethenoc Bah que... que nous... nous, qu'on n'en avait, euh... plus ou moins, euh... rien à... rien à péter« n'en avoir rien à péter » (loc.) Se désintéresser d’une chose ou y être totalement indifférent
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.
Roparzh Ah bah oui, voilà, j'allais dire pareil !
Arthur (Triomphal, à Bohort et Léodagan.) Et voilà.
Léodagan Oui oh bon ça va, hein.
Arthur Comment « ça va », oui, ça va, le peuple en a rien à péter« n'en avoir rien à péter » (loc.) Se désintéresser d’une chose ou y être totalement indifférent
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 ! C'est bien ce que je disais.
Bohort Ce n'est peut être pas très représentatif...
Léodagan Et puis de toute façon, c'est pas du peuple hein, c'est des pégus !
(Fermeture.)
Salle du trône, jour. Arthur est assis sur son trône, Bohort et Léodagan sont assis de part et d'autre de lui ; devant eux se tiennent Guethenoc et Roparzh.
Guethenoc Bon alors d'accord, admettons, hein ça nous met de travers« mettre (quelqu'un) de travers » (loc.) Contrarier, fâcher quelqu'un
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, c'est intolérable, tout ce que vous voulez, hein... ça change quoi derrière ?
Arthur Derrière qui ?
Roparzh Non mais c'est une supposition. Mettons qu'on l'aime pas votre nouvelle femme, nous autres...
Guethenoc Sauf, sauf, sauf que j'ai pas encore vraiment bien compris qui c'était, moi.
Roparzh Mais si ! Bon Dieu mais faites un effort vous aussi, c'est la... c'est la femme du chevalier Kapeston !
Arthur « Karadoc ».
Roparzh Oui bon. Mettons qu'on l'aime pas, la nouvelle. Qu'est-ce qui se passe, vous reprenez la vieille ?
Bohort Non ! Simplement, le roi est averti que vous désapprouvez son attitude.
Léodagan Ah mais c'est juste ça ?
Roparzh Mais pour les giboulées alors ? Mais nom de bi, mais j'y comprends plus rien moi !
Guethenoc Pour les giboulées, femme ou pas femme, c'est pour notre cul ?
(Noir.)
Guethenoc Ou c'est suivant ce qu'on répond ?
(Stab final.)